La récréation, sans risque, sans récompense

La récréation, sans risque, sans récompense

Si vous croisez cette mère qui, de façon délibérée, ne surveille pas son enfant lorsque celui-ci saute et se précipite dangereusement dans le parc, ne soyez pas trop sévère avec elle. Elle est peut-être en train d’encourager sa fille à prendre des risques parce qu’elle connaît les bienfaits de ces gestes casse-cou — mais elle sait aussi pertinemment que pour que cela arrive, sa fille ne doit pas voir les yeux inquiets de sa mère ni son expression de panique.

D’accord, vous m’avez cernée, je suis la mère en question et je suis quelque peu protectrice à l’excès. Mais parce que je préfèrerais ne pas voir le risque, ne signifie pas que je ne comprends pas l’importance qu’il peut avoir.

Dans Psychology Today, il y a un article fascinant (version anglaise) expliquant le lien entre la façon dont les enfants jouent et leur développement affectif. L’article cite des études selon lesquelles de jeunes rats ont été exposés à diverses formes d’expérience sociale, excluant les loisirs, et qui commencent par la suite à « en faire trop par peur et sans pouvoir s’adapter ni explorer comme le ferait un rat normal », ainsi que des études similaires sur des singes. Ces études, entre autres, donnent du crédit à la « théorie du jeu pour la stabilisation des émotions, la théorie selon laquelle l’une des fonctions majeures du jeu est d’enseigner à de jeunes mammifères comment réguler la peur et la colère afin de pouvoir affronter des dangers de la vraie vie, d’interagir dans des espaces confinés avec d’autres, sans succomber à des émotions négatives.

Appliqué de la même façon aux enfants, il ne s’agit alors pas seulement du petit Nicolas escaladant une clôture afin de prouver à ses amis qu’il n’est pas une poule mouillée, c’est l’occasion pour lui de surmonter ses peurs; ainsi, la prochaine fois qu’il fera face à une nouvelle expérience, il sera bien plus à l’aise. Naturellement, cela n’arrive pas dès la première tentative, et ce n’est pas quelque chose que l’enfant va comprendre, mais chaque fois que le petit Nicolas fera face à un nouveau défi lors de la récréation, il sera lentement mais sûrement en train de se préparer à affronter d’autres obstacles de la vie.

Réciproquement, toutes les fois que nous voulons contrôler la récréation des enfants, nous les empêchons de découvrir par eux-mêmes ce qu’ils peuvent gérer, un sentiment qui va les accabler lors d’activités non récréatives. C’est cette épreuve et la faute sur les balançoires, sur la glissoire ou en grimpant à un arbre qui encourage la confiance en soi qui va bien au-delà la cour de récréation.

De plus, aussi bonnes les intentions des parents soient-elles, lorsqu’il s’agit de contrôler le temps de récréation et de sport, l’auteur souligne judicieusement que les enfants sont « bien plus susceptibles de se blesser lorsque ce sont les adultes qui les dirigent » étant donné que la spécialisation est souvent à la clef, ce qui engendre une surutilisation des muscles et des articulations et aussi du fait que ces sports contrairement au jeu libre, sont souvent si compétitifs que cela amène les enfants à compenser tout en mettant en péril leur santé et celle de leurs coéquipiers.

Malheureusement, c’est le dernier point soulevé par l’auteur qui est peut-être le plus saillant : dans la société d’aujourd’hui excessivement prudente, les enfants n’ont pas la même liberté de mouvement, pour explorer de leur côté, ou simplement jouer sans supervision et l’auteur croit que ce changement vers le jeu dirigé affecte sans doute le bien-être émotionnel des enfants. Elle a même des statistiques dérangeantes pour prouver ses dires : « Cinq à huit fois plus de jeunes gens souffrent de dépression et d’anxiété à des niveaux cliniques importants selon les normes de nos jours, qu’en 1950. » Cela peut-il être une coïncidence?

Il y a réellement de nombreux facteurs qui influencent le développement de l’enfant, mais une chose est claire, le jeu est une composante essentielle et vitale.

Êtes-vous d’accord avec cela? Que pensez-vous des enfants qui prennent des risques?

Tweetez, allez sur Facebook ou laissez un commentaire ci-dessous. Je serai là, dans l’attente de vous lire en me cachant les yeux pendant que ma fille grimpe sur son premier arbre.

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