Une étude révèle pourquoi les enfants ne jouent plus

Une étude révèle pourquoi les enfants ne jouent plus

Bon nombre d’entre nous soupçonnaient que le jeu libre autonome avait considérablement perdu des plumes ces dernières décennies. Des recherches le prouvent désormais : les enfants s’adonnent beaucoup moins au jeu libre actif que leurs parents et leurs grands-parents quand ils avaient leur âge.

Or, une étude d’envergure s’est intéressée aux raisons pour lesquelles les enfants ne jouent plus autant.

Cette récente méta-étude regroupe des recherches, effectuées au Canada et dans d’autres pays développés, qui s’attardaient aux raisons pour lesquelles les enfants d’aujourd’hui ne jouent pas de la même façon qu’à l’époque de leurs parents et grands-parents. Ils ont conclu que le niveau de jeu libre autonome était fonction d’un éventail d’importants facteurs :

  • les caractéristiques de chaque enfant;
  • les restrictions parentales;
  • le quartier et le milieu physique;
  • les convictions sociales à l’égard des rôles et des idéaux parentaux;
  • l’érosion de l’esprit communautaire.

La conclusion? Les interactions entre ces facteurs créent un écosystème complexe que nous devons mieux comprendre afin que nos enfants retrouvent un intérêt pour le jeu libre.

Caractéristiques de l’enfant

Selon l’étude, plus les enfants vieillissent, plus leurs parents ou leurs tuteurs sont susceptibles de leur permettre de s’adonner à des jeux libres actifs et autonomes. De même, si leurs parents ont l’impression qu’ils sont assez compétents ou prudents pour reconnaître les dangers potentiels à l’extérieur de chez eux et y réagir, ils leur donnent plus d’occasions de sortir pour jouer.

Il y a cependant un préjugé sexiste. Les filles ont généralement moins de liberté que les garçons; ceux-ci ont plus souvent le droit de jouer dehors sans supervision, en plus de pouvoir s’éloigner davantage et rentrer plus tard.

Restrictions parentales

Quand les parents interdisent à leurs enfants de sortir pour jouer, c’est principalement parce qu’ils s’inquiètent de leur sécurité. Ce sont leurs craintes des étrangers, des intimidateurs, des adolescents et de la circulation automobile qui constituent les plus grands obstacles au jeu libre actif et autonome. Et si l’on pense aux générations précédentes, il devient clair que ces craintes ont augmenté avec le temps. Jadis, les parents laissaient beaucoup plus de liberté à leurs enfants. Cette citation d’une mère est particulièrement éloquente :

« Quand j’avais 14 ou 15 ans, je passais mes journées sur la plage. Je ne laisserais jamais mes enfants faire de même à cet âge. Les dangers n’ont pas changé : c’est la même mer. Pourtant, je ne le permettrais pas… même si mes parents l’ont fait. »

Bon nombre de parents tentent d’assurer la sécurité de leurs enfants au moyen de diverses formes de surveillance. Certains limitent l’aire de jeu de leurs enfants et leur imposent une heure de rentrée, d’autres les reconduisent à leur destination, leur permettent de sortir jouer seulement avec des amis ou les obligent à garder un cellulaire. Que ce niveau de vigilance soit justifié ou non, il inhibe tout de même le jeu libre actif et autonome.

Quartier et milieu physique

Un autre obstacle au jeu libre, c’est qu’il y a moins d’enfants qui vivent à proximité les uns des autres dans les quartiers. Il est donc de plus en plus rare que la « force du nombre » rassure les parents et les incite à laisser leurs enfants jouer dehors.

Les aires de jeu adaptées aux groupes d’âge sont également trop rares. Les enfants plus vieux et les adolescents trouvent généralement l’équipement fixe des terrains de jeu ennuyants. La plupart des enfants préfèrent les espaces de jeu flexibles où ils peuvent s’adonner à divers types de jeux et d’activités, au lieu de se faire « dicter » une façon de jouer par l’équipement ou l’aménagement. Par ailleurs, pour que les enfants puissent s’y livrer à des jeux libres actifs, ces aires doivent être accessibles et à proximité.

Changements sociaux

L’une des conclusions les plus décourageantes de la recherche décrit le changement subtil et progressif de nos valeurs sociales, qui nuit au jeu libre autonome des enfants. Ces dernières décennies, l’esprit de communauté qui sous-tendait le réseau de soutien et favorisait la confiance entre les familles et les enfants d’un quartier s’est lentement érodé. De plus en plus, les gens ne connaissent pas leurs voisins et par conséquent, la confiance cède le pas à la crainte.

Dans les quartiers où l’on s’est particulièrement employé à donner un nouveau souffle au jeu libre actif et autonome, les résidents ont travaillé fort à instaurer un esprit de communauté. Ils se sont efforcés d’apprendre à se connaître, ils ont organisé des événements communautaires, et ils ont passé plus de temps dehors, dans leur quartier, pour croiser plus souvent leurs voisins.

Un autre changement social a été surnommé par les chercheurs l’« idéal du bon parent ». Pour être à la hauteur des perceptions collectives de l’idéal parental, certains parents se sentent obligés de surveiller constamment leurs enfants. Ainsi, ceux qui permettent à leurs enfants d’errer à leur guise pourraient être considérés comme de mauvais parents.

Enfin, l’évolution des rôles des parents constituerait aussi un facteur important du déclin du jeu libre. En particulier, en raison du nombre plus élevé de mères qui travaillent, les enfants passent plus de temps au service de garde avant et après l’école, où le jeu est limité aux aires structurées.

Écosystème social et initiatives communautaires

Vu la diversité des obstacles s’opposant au jeu libre actif et autonome, les chercheurs croient que des solutions créatives s’imposent pour corriger l’écosystème social complexe qui découle de ces facteurs. Plus précisément, ils insistent sur l’importance des initiatives communautaires qui promeuvent et favorisent le jeu libre actif dans le respect des convictions contemporaines à l’égard de l’idéal parental.

Quand des chercheurs canadiens, dans le cadre d’une étude intergénérationnelle, ont demandé à des enfants, à des parents et à des grands-parents de leur nommer des façons d’encourager le jeu libre actif, ils ont entendu une foule d’idées. Certains ont suggéré de rendre les terrains de jeu, les parcs et les autres installations plus attrayants et intéressants aux yeux d’enfants et d’adolescents de différents âges. D’autres ont recommandé de créer plus d’occasions de jeu supervisé, afin d’apaiser les craintes des parents, ou d’organiser plus d’événements communautaires pour rassembler résidents et voisins, comme des festivals saisonniers.

Enfin, bon nombre d’adultes, et même des enfants, ont avancé que la diminution de l’utilisation des technologies, notamment la limitation du temps passé devant un écran et sur Internet, et la supervision des activités en ligne, pourrait revitaliser le jeu libre.

Bien que les obstacles au jeu libre soient nombreux, nous avons néanmoins une idée claire de ce qui doit changer. Les parents et les collectivités doivent désormais se demander : « Avons-nous la volonté d’apporter ces changements? »

 

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