Trop sérieux, le sport jeunesse?

Trop sérieux, le sport jeunesse?

Soixante-sept pour cent des parents sont de cet avis.

C’est d’ailleurs sur cette statistique éloquente que s’ouvre la toute dernière pub télé de Tim Hortons. On y voit Sidney Crosby et Nathan MacKinnon, deux étoiles du hockey, qui se tournent vers les « vrais experts », les enfants eux-mêmes, pour savoir comment rendre le jeu plus amusant.

« Des chiots! », répond l’un d’eux. « Une piñata! », ajoute un autre. Puis vient ma réponse préférée : « Des jambières de gardien qui pètent! » Toutes ces idées sont ensuite mises en œuvre et, bien sûr, les chiots sont adorables. Prenez une minute pour regarder cette pub. (version anglaise)

Je l’adore pour deux raisons.

D’abord, elle rappelle au grand public un message essentiel : le sport jeunesse doit être amusant.

Elle laisse surtout entendre que la meilleure manière d’y arriver, c’est de consulter les enfants, et comment prétendre le contraire? Après tout, c’est leur jeu, pas le nôtre.

Évidemment, c’est impossible d’intégrer des chiots à une partie de hockey ou de suspendre des piñatas géantes en forme de beignes au-dessus de la patinoire, mais cette publicité nous invite quand même à trouver des moyens de rendre le sport plus agréable pour nos jeunes. Pour ma part, je crois qu’on gagne à observer comment ils agissent quand on les laisse jouer spontanément, sans intervention des parents.

Comment les enfants jouent et compétitionnent

C’est ce que j’ai fait récemment. J’étais à l’un de ces complexes multiglaces dont les patinoires sont séparées par un espace ouvert. Six enfants âgés de sept à neuf ans environ se sont réunis dans cet espace pour jouer au soccer avec une balle en mousse Nerf.

Ils ont formé deux équipes, déplacé des chaises pour en faire des filets et commencé leur partie. Après cinq minutes et quelques buts, un garçon a crié : « C’est 5 à 1, on a gagné! ». Les vainqueurs ont célébré. La première partie était terminée.

De leur côté, les perdants avaient la mine basse. « Je déteste la défaite! », a lancé une fille, mais le sourire sur son visage indiquait que ce n’était tout de même pas la fin du monde. Puis elle a ajouté : « Reformons les équipes. » Trente secondes plus tard, c’était fait, et une nouvelle partie battait son plein.

Ce qui les motive

En tant que parents, entraîneurs et organisateurs, nous encadrons les activités et les sports de nos enfants. C’est une grosse responsabilité, et c’est pourquoi nous devons être attentifs à la manière dont ils jouent et compétitionnent pour essayer de comprendre leurs motivations.

C’est ce que j’ai fait en regardant la partie de soccer. Voici quelques leçons que j’en ai tirées :

  1. Jouer est plus important que gagner
    Certains enfants n’aiment pas les sports de compétition, mais la plupart de ceux qui les pratiquent s’amusent… à condition que la victoire ne soit pas la priorité.

Les joueurs de soccer que j’ai observés faisaient tout en leur possible pour gagner, mais ce n’est pas la raison pour laquelle ils avaient choisi de se rassembler : ils voulaient simplement jouer. Bien sûr, le désir de victoire augmentait leur énergie et leur enthousiasme, mais c’est surtout le plaisir de jouer qui les animait.

  1. L’égalité augmente le plaisir
    Oui, gagner la partie motivait les joueurs à tout donner, mais pour ces enfants, le plaisir passait avant tout. Un pointage de 5 à 1? Ça n’avait rien d’amusant pour personne. Ils n’ont donc pas hésité à refaire les équipes à quelques reprises pour mieux répartir les forces.

Je crois qu’ils ont agi ainsi parce que c’est beaucoup plus agréable quand le match est corsé et son résultat, incertain. Quand chacun sait qu’il a une chance de l’emporter, tout le monde y gagne.

  1. Le résultat est vite oublié
    J’ai regardé ces enfants jouer pendant une quinzaine de minutes. Ils ont eu le temps de disputer six ou sept parties, et les mêmes comportements se répétaient chaque fois : les gagnants célébraient, les perdants avaient l’air abattus – mais pendant cinq secondes seulement, et un autre match commençait.

Heureux ou déçus, ils n’en faisaient pas un plat. Si un parent disait « l’équipe qui marque le prochain but l’emporte », tous les joueurs redoublaient d’ardeur. Et quand ce fameux but était compté, le match prenait fin et ils passaient à autre chose. Pas de gagnants, pas de perdants : seulement des enfants heureux.

L’expérience doit être enrichissante

Les études comme les lignes directrices recoupent mes observations : la victoire à tout prix n’est jamais la priorité des enfants, et la compétition doit demeurer enrichissante pour en valoir la peine.

Le sport jeunesse peut devenir beaucoup trop sérieux quand les espoirs et désirs des parents prennent le pas sur le plaisir des enfants. Dans des sports comme le hockey et le soccer, des entraîneurs tentent cependant de remettre les pendules à l’heure.

Ces efforts sont louables, et je suggère à tous les adultes qui jouent un rôle d’encadrement de s’arrêter un instant à ce que nous enseigne la pub de Tim Hortons : si le sport jeunesse existe, c’est pour le bien des enfants.

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